Un petit cours de physique stellaire sans prétention. La production de chaleur par les étoiles est souvent assez bien vulgarisée. Mais la transmission de cette énergie vers la surface, phénomène extrêmement structurant dans la vie de l'astre est en général peu explicitée. Essayons de combler cette lacune.
Les transferts de chaleur dans les étoilesLa chaleur étant produite par les réactions nucléaires dans le coeur de l'étoile, il y a deux façons de la conduire à travers l'enveloppe vers la surface où elle ira rayonner dans l'espace :
- par transfert
radiatif,
- par transfert
convectif.
Dans le premier cas, l'enveloppe est statique, dans le second cas, elle bouillonne.
Commençons par considérer une enveloppe statique, formée de couches sagement empilées et qui ne se mélangent pas. Dans ce cas, le transfert est assuré par les collision des photons avec les électrons et les ions qui transfèrent la chaleur de proche en proche, d'où son nom de transfert radiatif.
Le flux de chaleur F (en W/m²) qui traverse une couche d'épaisseur infinitésimale dr est proportionnel au gradient de température
:
où le coefficient C se calcule comme :
avec :
α = 7,56.10
-16 J.m
-3.K
-4 la constante de radiation
c la vitesse de la lumière
κ l'opacité spécifique du milieu, ou coefficient d'absorption massique
ρ la masse volumique (ou densité)
On voit que le transfert radiatif augmente fortement avec la température (c'est en T³), diminue avec le densité du milieu, les photon ayant du mal à traverser un milieu dense et avec l'opacité spécifique de ce milieu qui dépend de la nature des interactions entre les photons et les (électrons + ions) qui se trouvent sur sa route.
A faible température la matière est sous forme d'atomes électriquement neutre avec lesquels les photons ont peu d'affinité, la matière est transparente, κ petit).
A température plus élevée la matière devient ionisée (plasma) et les photons sont constamment absorbés et réémis, essentiellement par les électrons liés au noyau (κ augmente avec T).
Au dela de T ~ 10
5 K l'énergie des photons est telle qu'il devient de plus en plus difficile pour les ions d'absorber les photons (dont l'énergie est en T³). κ commence à baisser.
Finalement, au dela de T ~ 10
6 K, il ne reste plus aucun électron liés au noyau, et les photons diffusent sur des électrons libre (κ constant).
Bon, en considérant l'étoile à l'équilibre, cela signifie que l'énergie ne s'accumule dans aucune enveloppe en partant du centre jusqu'à la surface. Ce qui signifit que F, le flux d'énergie est le même partout
(1).
Considérons maintenant le gradient de température
, le quotient du flux (constant) sur le coefficient de transfert radiatif (qui varie du centre vers la surface) :
Dans le terme de droite, C dépend des éléments que nous avons listés : T, κ (lui même dépendant de la température comme vu), ρ (qui augmente avec la profondeur) ; F on l'a dit est constant.
Quand le gradient de température dépasse une certaine limite, le milieu devient instable. L'écart de température induit un écart de densité (plus c'est chaud, moins c'est dense), des bulles de gaz chaud se forment et montent, mues par la poussée d'Archimède. Elles transfèrent leur énergie en se mélangeant aux couches supérieures plus froide puis retombent par gravité. Il se forme un mouvement d'ensemble de convection. On pourrait dire ça comme ça : la matière n'arrivant pas à se débarrasser de son énergie en la confiant au rayonnement finit par se charger elle-même du boulot
.
Ces mouvement de convection mélangent très efficacement les zones affectées et uniformisent leur composition chimique.
Cela se produit notamment quand κ est élevé ou quand F est trop important, enfin selon une combinaison de ces deux cas.
F grand correspond aux cas des
étoiles massives qui brulent selon le cycle CNO, fortement dépendant de la température. Leur température centrale fait qu'elle sont "emballées" et que le flux dégagé est très important. Elles pratiquent donc le transfert convectif en profondeur et radiatif en périphérie. Le mélange convectif permet de ramener du combustible frais vers le coeur et augmente la durée de vie des étoiles massives.
κ élevé correspond aux couches périphériques des
étoiles de faible masse, comme le Soleil. Elles pratiquent le transfert radiatif en profondeur (sur 0,86 rayon pour le Soleil) et sont convectives en surface. La transition a lieu vers 500 000 K, température à laquelle les éléments lourds de l'enveloppe (carbone, oxygène, azote) parviennent à retenir quelques uns de leurs électrons, opacifiant ainsi le milieu. La teneur en éléments lourds (c'est à dire plus lourds que H et He, la "métallicité" de l'étoile dans le jargon astrophysique) joue donc un rôle important dans la dynamique des transferts d'énergie. Comme le coeur n'est pas mélangé, elles ne brulent qu'une petite partie de leur réserve totale, environ 10% dans le cas du Soleil.
Cette structure (coeur radiatif, enveloppe convective) concerne également les
géantes rouges mais la fraction qui convecte est beaucoup plus importante et descend très profondément. Par
dragage convectif elles font remonter depuis les profondeurs les produits de combustion (hélium, puis carbone, oxygène...) qui sont ainsi détectable par spectrométrie dans leur atmosphère, ce qui permet d'affiner les modèles de structure interne.
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(1) Si ce n'est bien sûr que la surface de diffusion devient de plus en plus vaste quand on s'approche de la surface. Par unité de surface F est en 1/r2. Il diminue donc du centre (r petit) vers la surface (r = R, le rayon de l'étoile).