Arche interstellaire
Gilgamesh, 14 février 2007 in PhilosophieAutres langues :
Le thème du trajet vers les étoiles, de système planétaire à système planétaire, nous est à la fois tout à fait familier et totalement étranger. Familièrement, nous avons certainement tous en tête des histoires de science-fiction ayant pour cadre une galaxie (éventuellement lointaine, très lointaine…), dans laquelle les planètes jouent le rôle de nations ou de provinces d’empire. Les protagonistes se déplacent de l’une à l’autre dans des durées compatibles avec la tenue de la narration. Le trajet parait une formalité que les prochaines avancées d’une Physique Triomphante mettront à portée de main.
C’est ce que nous nommerons la stratégie “zéro” (S0) : on entend par là que le temps de trajet est “instantané”, à tout le moins inférieur à la durée d’une année terrestre, c’est à dire comparable aux trajets que nous effectuons à la surface de la Terre, aux trajets des missions lunaires et à ceux envisagés vers d’autres corps du système solaire, s’il s’agit de missions habitées.
Le trajet vers les étoiles nous devient par contre très étrange si nos envisageons qu’une telle avancée de la Physique pourrait bien ne pas avoir lieu, que la célèbre constante d’Einstein c, la vitesse de la lumière (3E8 m/s), représente un horizon de vitesse indépassable et même excessivement difficile à approcher, de sorte que l’espace deviendrait à nos yeux ce qu’il est déjà pour l’astronome : une immensité comparée à laquelle celle des océans terrestres n’est rien.
Ce n’est pas sans réticence que l’esprit s’approprie les dimensions réelles des espaces interstellaires. Et la déraison de ces distances n’est pas seule en cause. D’une certaine façon, on pourrait dire que la stratégie zéro s’enracine dans un désir enfantin d’espace. Non pas l’espace-distance, cet horrible espace nu, muet, impavide, mais l’espace-trésor et les mondes qui roulent au sein de son immensité. Tous ces mondes dont l’atteinte ne saurait souffrir aucun retard et à la découverte desquels s’active notre imaginaire.
Réalisme aidant et quittant avec un certain regret le vert paradis de stratégie zéro, nous pouvons toutefois envisager dans le cadre de la Relativité Restreinte une stratégie plus “adolescente” - si la première est enfantine - que nous nommerons stratégie courte ou SI, qui promet le trajet en une vie d’homme.