Strange Paths
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Message Gilgamesh Moderator le 07 Avril 2007 14:12


Dans ce fil, chacun est invité à proposer son choix de livres et d'articles scientifique, sous forme de compte rendus ou de demandes d'explications.

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Au sujet de la théorie du Landscape (paysage de la théorie des cordes), voici une traduction récente de l'ouvrage de vulgarisation de Susskind, un des auteurs de la théorie. J'avais vu l'ouvrage en anglais et je me demandais pourquoi ça n'existait pas en français. Eh ben c'est sorti cette semaine (enfin, le 26/3) en traduction française, je viens de l'acheter.

Je vous dirais si j'ai aimé :P

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Le Paysage cosmique
Notre univers en cacherait-il des millions d'autres ?
de Leonard Susskind
Editeur : Robert Laffont
Publication :26/3/2007
Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Bella Arman
22 €

Résumé : S'il y a bien une chose dont nous devrions nous réjouir, c'est d'être ici, sur cette terre, dans cet univers. Car, au regard des lois de la physique, la probabilité que nous existions est quasi nulle. Il n'est pourtant pas besoin de faire appel à une volonté divine ou à des explications surnaturelles pour comprendre l'émergence de la vie et de l'homme. Imaginez plutôt l'existence d'un 'paysage cosmique' où il n'y aurait pas un seul mais une multitude d'univers...
Dernière édition par Gilgamesh le 13 Avril 2007 12:08, édité 1 fois au total.



Message el muchacho le 11 Avril 2007 21:29

Allez, une biographie exceptionnelle d'une personnalité hors du commun:
http://www.americanprometheus.org

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John Robert Oppenheimer, jeune physicien américain qui a fait ses classes en Europe, rejoint le projet Manhattan avant d'être rapidement désigné directeur scientifique du projet par le général Grove, en charge de ce projet ultra secret, et ce en dépis des amitiés qu'Oppie, - comme l'appellent ses élèves -, entretient avec des communistes. Cet homme qui a priori n'a rien pour cela, se révèle être à la fois un grand administrateur, et une force motrice dont l'impulsion permettra de surseoir en un temps record aux énormes difficultés techniques qu'affrontent les scientifiques qui travaillent sur la bombe américaine.

Auréolé d'un succès sans pareil, Oppenheimer deviendra aussi célèbre qu'Einstein. Mais avec la célébrité, vient la responsabilité. Profondément ébranlé par les bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki, le "'père de la bombe" devient à son corps défendant la conscience des savants qui se détournent du projet Manhattan. Ecartelé entre ses obligations morales et les impératifs qu'implique sa qualité de conseiller scientifique pour la sécurité nationale, il doit affronter les faucons de l'administration qui engagent le pays dans une course effrénée à l'armement nucléaire avec l'ennemi soviétique.

Ceux-ci voient en Oppenheimer un puissant ennemi et un subversiste, il devient l'homme à abattre. Avec le Maccarthisme, ils en profitent pour mettre en avant ses anciennes relations communistes pour l'écarter. Ce sera l'épisode de l'audition au cours de laquelle il sera démis de ses autorisations de sécurité, - et par là même de ses fonctions de conseiller -, véritable accusation de trahison pour un homme qui fut tjrs intègre et fidèle à son pays. Cette condamnation finira de miner le moral du scientifique.

Homme raffiné, d'un charisme et d'une culture extraordinaire, Oppie recevra à sa mort les honneurs des savants, des militaires comme des hommes de lettres qui l'ont cotoyé sa vie durant.


Cette biographie extrêmement touffue nous plonge au coeur d'une époque étonnemment proche et retrace les étapes de la construction d'un homme d'une très grande complexité, jusqu'à son dénouement tragique. Portrait sans concession, il détaille la part d'ombre d'une personnalité à la vie hautement romanesque, qui fut à la fois le symbole du savant poursuivi par sa conscience, et le crucifié des intérêts supérieurs de la nation.

Hautement recommandé.



Message Gilgamesh Moderator le 11 Avril 2007 23:14

Le Prométhée américain, oui, ça lui va bien.

Il est allé conquérir le feu et s'est fait dévorer le foie... Et toujours il a accompli son devoir.

C'est bien cela le destin tragique.

a+



Message Gilgamesh Moderator le 12 Avril 2007 21:26

Bon, j'ai fini le Paysage cosmique.

Le livre est de la même famille que "L'Univers élégant" de Brian Greene. Même ton d'auteur, sujets voisins. Mais les deux restent complémentaires. Il s'agit de livres "sans math" exposant à l'aide d'image familière et en prenant volontiers appuis sur les anecdotes et le vécu du chercheur, une aventure intellectuelle extrêmement stimulante voire prometteuse. Le domaine est à la fois grand public, puisqu'il touche à une question des plus familière parmi celles qui fondent l'existence ("d'où venons nous ?") et d'une épouvantable difficulté d'approche. Toute vulgarisation étant périlleuse à vouloir réunir l'opinion et la spécialité, il faut apprécier à son juste prix que de grandes pointures se jettent aussi volontiers à l'eau.

Et il y va carrément, Susskind. Il a les idée claires, il exprime une opinion tranchée, cohérente, structurée et je dirais même guillerette. Aucune acrimonie, ni moquerie, sinon amicale, dans son propos, mais il est bel et bien habité par le désir de convaincre. Alors que Brian Greene expose, Susskind défend. Il rend public un débat. Pour qui veut connaitre le monde des cordes, je conseille de commencer par Greene qui est plus détaillé.

Là, il s'agit du statut métaphysique des lois de ce monde. Sont elles contingentes, ou sont elles nécessaires ? La Physique fondamentale est toute entière habitée par ce désir de trouver une profonde unité dans le réel, c'est à dire de lui trouver une nécessité. S'il n'y a qu'une seule solution, alors ce monde est nécessaire, dans la mesure où il n'y avait pas d'autre monde possible que celui ci. Et le désir de simplicité revient à rechercher une équation fondamentale qui résume tout ; assez compacte pour "qu'on puisse l'écrire sur un T-shirt" pour reprendre le mot de Hawking.

Eh bien c'est impossible, affirme Susskind. Ce monde est contingent, il ressemble aux machines de Rube Goldberg". C'est à dire des machines au mécanismes inutilement compliqué et parfois carrément saugrenu. Le désir des théoriciens de trouver une solution "unique" a été battu en brèche par... eux mêmes. Le monde mathématique des cordes a révèlé, au contraire du souhait général (Susskind s'inscrit dans le lot), une variété de structures tout à fait ébouriffante. Seule un très petit nombre convient à la vie. Si l'Univers est tel qu'il est, c'est simplement parce qu'il est un des rares à accepter un observateur.

L'illustration de couverture montre une Terre faisant face à une éclipse de Soleil. C'est bien choisi et parfaitement illustratif du propos. Le fait que le Soleil et la Lune aient exactement le même diamètre angulaire est tout à fait fortuit, et à la fois très émouvant, pour qui a contemplé une fois le phénomène. C'est à la fois important et sans nécessité.



Pour qui est familiarisé avec la physique du XXe siècles, on peut sauter les 4 premiers chapitres. Il vaut mieux, même. Susskind n'est pas un historien, on pourrait croire en le lisant qu'il n'y a qu'un seul physicien au XXe siècle, Einstein :roll: . A retenir quand même l'explication des diagramme de Feynman. Je trouve par contre assez exorbitant qu'il ne connaisse pas du tout Lemaître. Tout le propos du livre tourne autour de la naissance de l'Univers et de la constante cosmologique, et le premier physicien a fonder dans le dur que notre univers à une origine et à donner une importance stratégique à la valeur de lambda n'est même pas en index.

a+



Message Gilgamesh Moderator le 14 Avril 2007 16:28

Tiens je suis tombé par hasard sur une machine de Rube Goldberg en ligne :)

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Message art_dupond le 18 Avril 2007 18:10

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Petit livre sympatique retraçant l'histoire de la physique d'Aristote à Newton (on y parle beaucoup d'astronomie - systèmes des sphères homocentriques d'Aristote, ..., système de Copernic, Galilée, ...).


Je trouve intéressant de voir comment les gens pensaient avant, et de constater qu'on pense toujours pareil aujourd'hui (un objet plus lourd tombera évidemment plus vite qu'un objet léger...) :)


Facile et sympas à lire :)

_________________
oui oui



Message lambda0 le 14 Avril 2010 17:15

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J'avais lu l'année dernière ce pavé commis par Penrose (je trouve que le titre en français "la prodigieuse histoire..." fait un peu titre de documentaire Walt Disney).
C'est un panorama de la physique et des outils mathématiques utilisés en physique théorique.
L'auteur prétend que son ouvrage ne nécessite aucune connaissance préalable en mathématiques et essaye de nous en convaincre en commençant par expliquer ce qu'est une fraction, histoire de mettre en confiance l'innocent lecteur.
Bon, évidemment, arrivé aux espaces fibrés, on commence à se douter de quelque chose, et j'ai finalement renoncé à l'offrir à ma petite soeur (allergique aux sciences, elle a fait des études artistiques après le bac).
J'apprécie bien, au passage, que Penrose qui se définit comme un platonicien, admette que le point de vue opposé est aussi tout à fait honorable et défendable (la dernière fois que j'ai suggéré que les nombres entiers n'étaient peut être qu'une création de l'esprit humain au même titre que le latin ou la recette de la tarte tatin, je me suis fait tailler en pièces par des matheux indignés, mais bon, c'est vrai que je provoquais un peu).
Appréciable aussi l'honnêteté de l'auteur qui marque bien la différence entre ce qui est consensuel et ses idées personnelles quand celles-ci s'écartent du consensus (cf son scepticisme sur l'inflation par exemple).

A lire plusieurs fois, à plusieurs mois d'intervalles, c'est tellement riche qu'il me parait très difficile de tout assimiler en une seule lecture. A moins d'être déjà spécialiste...



Message Welkin le 16 Avril 2010 14:55

Gilgamesh a écrit:
Bon, j'ai fini le Paysage cosmique.




Eh bien c'est impossible, affirme Susskind. Ce monde est contingent, il ressemble aux machines de Rube Goldberg". C'est à dire des machines au mécanismes inutilement compliqué et parfois carrément saugrenu. Le désir des théoriciens de trouver une solution "unique" a été battu en brèche par... eux mêmes. Le monde mathématique des cordes a révèlé, au contraire du souhait général (Susskind s'inscrit dans le lot), une variété de structures tout à fait ébouriffante. Seule un très petit nombre convient à la vie. Si l'Univers est tel qu'il est, c'est simplement parce qu'il est un des rares à accepter un observateur.





a+

Ca ressemble fortement à un énoncé de principe anthropique : l'univers présenté comme une émanation ontologique. Une des critiques adressées par Lee Smolin aux théoriciens des cordes est que selon lui ils embrassent trop facilement des idées de ce type, faibles d'un point de vue épistémologique. Est-ce que c'est ce qui ressort de l'ouvrage ?




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